Il ne fait pas bon d’être Rrom
La mairie et le Conseil municipal de Piatra Neamt ont décidé la construction d'un quartier situé en périphérie, destiné à accueillir tous les Rroms de la ville. C'est également dans ce quartier que devraient être réunis les enfants des rues. Trois bâtiments, ayant abrité un élevage de volailles, serviraient de base à ce projet. Le quartier, entouré de palissades, serait gardé par des gendarmes. La mairie prévoit de fournir du travail aux futurs habitants afin qu'ils soient en mesure de payer leurs loyer et charges. Le quartier projeté devrait pouvoir accueillir 150 familles, alors que la mairie a recensé 4 000 Rroms. Cette initiative, taxée de raciste est critiquée par les représentants PNL et UDMR ainsi que par la société civile. Les auteurs du projet répliquent en arguant que beaucoup de logements sociaux mis à la dispositions des Rroms ont été dévastés par ceux-ci, engendrant de grosses dépenses pour la municipalité, et contestent le caractère discriminatoire de la décision. Il est certain que cette solution ne favoriserait en rien l'intégration de cette population à celle de la ville.
L'idée lancée par le maire de Piatra Neamt de construire un quartier spécial pour les tziganes a gagné des adeptes dans deux autres grandes villes : Deva et Baia Mare. Dans ces deux localités, l'administration locale envisage également de déménager les citoyens d'ethnie rrom qui vivent dans des conditions insalubres dans des zones spécialement aménagées pour eux.
La mairie de Deva a décidé de construire un quartier spécial pour les Rroms de la ville à la banlieue de la localité. Jusqu'à la fin de l'année, les 300 Rroms qui vivent à présent dans des logements improvisés sur la rivière de Mures et dans le quartier Ville Noi, devraient être transférés dans le quartier spécialement construit pour eux par la mairie. Le conseil local a alloué 400 millions de lei pour l'achat du terrain et les écuries des environs de la localité où 130 tziganes ont déjà été déménagés ces trois dernières années. La mairie envisage de transformer cette zone en lotissement avec canalisations, électricité et eau potable, où devront être transférés les autres Roms de Deva. Dans la localité de Baia Mare, les Rroms ayant formé de vrais quartiers improvisés à la périphérie de la ville seront transférés dans un quartier spécialement aménagés près du pénitencier. Selon les autorités locales, les centaines de chaumières dressées sans autorisation, en carton et en terre autour de la ville, seront démolies et leurs propriétaires seront déménagés dans des logements raccordés aux réseaux d'énergie électrique et d'eau potable dans la zone trouvée par la mairie. Les habitants de Baia Mare qui vivent près des lieux où les tziganes se sont installés ont déclaré que ces zones sont devenues de vrais foyers d'infection et qu'ils s'y sentent en insécurité.
Bien évidemment, les Rroms protestent et accusent ces maires de violer les droits fondamentaux de l'homme et certaines lois du pays.
Le président Iliescu a déclaré que cette décision de construire des quartiers spéciaux pour les Rroms n'est pas sage.
"Ce n'est pas ainsi qu'on résout les problèmes", a-t-il affirmé. Il a plaidé pour l'intégration sociale des Rroms. "Les problèmes économiques et sociaux doivent être très attentivement traités en collaboration avec la communauté en question, et non par l'isolement", a précisé Iliescu.
Même si le ministre des Informations publiques, Vasile Danca, avait dans un premier temps critiqué l'idée du maire de Piatra Neamt estimant que les problèmes de la communauté rrom ne peuvent pas être réglés ainsi, il a changé d'avis après avoir visité le quartier construit par la mairie. "Ce n'est pas un projet permettant d'isoler la communauté des Rroms", a dit Dancu. Il a précisé que dans le futur quartier, les familles de Rroms ne représenteront qu'un tiers du nombre des locataires. "C'est une chose exceptionnelle, c'est un très bon projet", a encore dit Dancu qui s'est montré enchanté par les conditions de logement offertes par les immeubles aménagés dans les anciennes fermes de poulets.
Quoi qu'il en soit, ces déclarations, annulées, puis reprises, à nouveau annulées, forment un engrenage dans lequel des messages racistes ont commencé à s'intensifier ; ainsi, à Deva, les murs des immeubles ont été remplis, ces derniers jours, d'affiches s'attachant à promouvoir la xénophobie, les personnes visées étant les tziganes et les juifs. Les affiches portent la signature du groupement la Nouvelle Droite ; un numéro de portable figure sur ces affiches où les sympathisants peuvent téléphoner.
Le ministre Dancu a déclaré que le danger d'actions xénophobes d'ampleur n'existait pas en Roumanie. Quant au groupement soi-disant fasciste la Nouvelle Droite, celui-ci ne serait qu'un "parti d'appartement des enfants terribles".